Etudes critiques / pensée politique


Les études critiques impliquent l’exercice d’une pensée politique dans la praxis de ses terrains. L’étude critique demande de contextualiser une "production donné" dans son histoire et dans ses effets esthétiques, politiques, éthiques.

Les études critiques ont pour source : la Théorie critique de l’histoire dans la filiation de "l’École de Francfort", soit de l’Institut de recherche sociale à l’université de Francfort.

Theodor W. Adorno (1903-69), Max Horkheimer, Walter Benjamin sont les plus connus parmi d’ autres penseurs et théoriciens de langue allemande, — sociologues, psychanalystes, philosophes qui réactualisent le matérialisme dialectique marxiste dans un vaste registre d’intérêts. Certains d’entre eux ayant pu émigrer aux États-Unis après 1933, la deuxième période américaine de la théorie critique de l’histoire se développe à partir de la fin des années trente dans les universités américaines, et reste aujourd’hui une base de travail active).

Les études critiques ont pour référent : la relecture de Karl Marx "au-delà de Marx" et les essais de théorie politique notamment ceux des philosophes de langue anglaise et allemande depuis le 18ème siècle. La culture de masse, l’industrialisation culturelle, le film, la musique, le théâtre, les arts et notamment les médias sont les objets de réflexion de la théorie critique.

Lien méthodologique entre théorie critique et théorie politique

Les études critiques s’articulent à : la théorie politique de l’État, au capital et aux capitales, aux productions juridiques, aux administrations étatiques, aux souverainetés coloniales, à la gouvernance nationale et supranationale, à l’analogie domestique dans la production biopolitique (famille, travail, commune, communauté, collectivité…).

Les études critiques à l’âge des échanges mondiaux ont pour objet : la gouvernance mondiale.

Par "gouvernance mondiale" on entend : le pouvoir en réseau. Les organismes nationaux internationaux et supranationaux (tribunaux internationaux, OTAN, FMI, OMC, etc.), les ordonnancements juridiques, la gouvernabilité disciplinaire et sécuritaire, les turbulences de l’ordre international, le marché mondial, le constitutionnalisme mondial, la culture globale et ses médias, la production des crises.

Pour introduction aux objets de la "gouvernance mondiale", voir Michael Hardt et Antonio Negri, Empire, trad. de l’américain Denis-Armand Canal, Paris, Exils Editeurs, 2000 (1ère éd. Harvard University Press 2000).

Les auteurs étudient les transferts de souveraineté et l’hypothèse d’une forme impériale dans la souveraineté capitaliste et dans l’administration de la société mondiale de contrôle. Ils analysent le potentiel de corruption de l’ordre mondial, le déclin et la chute de l’empire mondial sous le coup notamment des "multitude". La gouvernance mondiale sans gouvernement est un hybride global systémique, dynamique, articulé horizontalement et impliquant tous les acteurs sociaux, politiques, économiques, juridiques "sans reste". Les consensus internationaux font partie de cette gouvernance impériale. Les événements clés pour prendre date après la guerre du Vietnam, sont dans l’ouvrage Empire la fin de la guerre du Golfe, les embargos, la guerre dans les Balkans et le début de la guerre du Kosovo.

La praxis politique de Benjamin est fondée dans la théorie critique de l’histoire par une analyse politique de l’État et des institutions allemandes dans le contexte de la fin de la République de Weimar et des relations franco-allemandes.
Toute l’œuvre de Benjamin peut être lue comme une réflexion sur le politique, dans le champ du domestique et du local, de l’État et du global.
Benjamin remet en cause la capacité de l’État à assurer le droit de chacun et le droit international. Benjamin redéfinit le concept de politique dans le concept d’histoire et analyse la production du droit, notamment celle des "sans-noms", celle des vaincus de l’histoire. Benjamin voit dans une lecture hétérodoxe de Marx, la forme moderne de l’État comme une fonction créatrice de corruption et de torts politiques et éthiques majeurs à l’échelle micro civile et macro cosmopolitique.
Il définit la modernité comme "crise" dans son archéologie même (voir L’œuvre des Passages/Passagenwerk).Il la dialectise avec le potentiel du "sauvetage" [die Rettung] à chaque instant par la faible force messianique donnée à chacun [Jetztzeit].

Dans ses textes plus directement politiques, Benjamin assume la détermination positive de l’être-contre, dans laquelle être homme signifie être-contre, être en révolte active, intellectuellement et concrètement dans les choix quotidiens de l’existence au niveau du biopolitique, contre les armes du capital, l’autorité univoque, l’assujettissement, les normalisations et la gouvernance sans visage.

Voir la lecture de Critique de la Violence par Jacques Derrida, Force de loi. Le "Fondement mystique de l’autorité", Paris, éd. Galilée, 1994 (Force of Law in Drusilla Cornell et alii, (éd.), Deconstruction and the Possibility of Justice, New York, Routledge, 1992, p. 3-67).